Il y 100 ans, dans le diocèse d’Avignon : Avril 1915

27 mars 2015

Le premier numéro du mois d’avril du bulletin officiel du diocèse annonce les derniers décès du mois précédent : l’abbé Hugues, prêtre habitué à Monieux (décédé le 26 mars) et l’abbé Périol, prêtre habitué à Orange (décédé le 27 mars). Monsieur l’abbé Jean-François Hugues, né le 3 mai 1843 à Blauvac et ordonné prêtre en 1868, fut successivement vicaire à Vacqueyras (1868), à Malemort (1870), aux Carmes (1871) et enfin Entrechaux (1872), dont il devint recteur en 1880. En 1900, il fut nommé aumônier de Notre-Dame des Douleurs et du noviciat des Frères des Ecoles Chrétiennes. Monsieur l’abbé Pierre Louis Auguste Périol, né le 25 novembre 1838 et ordonné prêtre en 1863 avait d’abord été professeur à la maîtrise de la Métropole avant d’être nommé aumônier des religieuses de Saint Eutrope en 1866. Il fut ensuite vicaire à Mornas (1871), puis à Mazan (1877), avant d’être successivement recteur de Saint Pantaléon (1884) et enfin de la Croisière (1888). Il se retira à Orange dont il était originaire.
Quelques jours après, on apprenait le décès le 13 avril, à l’hôpital militaire de Royat de l’abbé Ginoux, des suites d’une maladie contractée au service militaire.

L’abbé Henri Ginoux, né à Saint-Paulien le 24 mars 1873 et ordonné en 1900, avait été successivement vicaire à Courthézon, à Notre-Dame de l’Observance (1907) et aux Carmes (1909). Il quitta Avignon le 2 février pour aller rejoindre son corps d’armée. Même s’il partait volontiers au service des soldats et des malades, il confiait son inquiétude à ses proches « je pars, mais je ne reviendrai pas », et il l’avait affirmé plusieurs fois. Il fut affecté à l’hôpital temporaire n° 32 à Royat, où il se dépensa plus que de raison. Il confiait lui-même : « j’ai un mal de tête qui me tue ; les médecins ne se sont pas encore prononcés sur mon état, mais personnellement, je crois à un épuisement. J’ai soigné mes blessés et de bien sérieusement touchés ; n’étant pas entraîné, je me suis éreinté. Mais ce que j’ai fait, je ne le regrette pas, et si j’étais à recommencer, je le referais ». Ce prêtre, décédé à 42 ans, qui avait un frère prêtre, vicaire à Yssingeaux (dans sa région d’origine), fut « un prêtre de beaucoup de tenue et d’une grande discrétion, il remplissait très ponctuellement ses fonctions de vicaire. Pendant les six premiers mois de guerre, il fut seul à seconder M. le chanoine Romette, curé de la paroisse ; en plus de ses occupations journalières, il assura le service de l’hôpital militaire des Femmes de France, où il a été toujours très apprécié et où il fait le plus grand bien. »

La semaine religieuse fait le compte-rendu de la prédication de l’archevêque à la Chapelle des Hommes, pour les militaires. Commentant la Semaine Sainte, « Monseigneur évoque, alors, l’image du Sauveur pleurant sur Jérusalem, qui a repoussé le salut, et lui disant : « Ah ! Si tu savais ce qui peut te procurer la paix ! » Cette parole, ce vœu – qui est aussi un regret - lui inspire un beau mouvement oratoire, où il s’adresse, d’abord à chacun de ses auditeurs, puis à la France, jadis si chrétienne, tant aimée de Dieu, et qui se relève déjà si bien au cours de cette terrible guerre, mais à qui il manque encore quelque chose pour retrouver « la paix »... Puisse-t-elle le comprendre et se tourner enfin vers Celui seul qui la donne ! ».

Avril 2015, c’est Pâques. Mais en cette période de guerre, la « sainte allégresse » est marquée par la tristesse : « l’Alleluia s’achève comme dans un soupir. Le cantique traditionnel est brisé : O filii et filiae... où sont-ils aujourd’hui, nos fils. Les uns sont là-bas sous la mitraille, exposés à chaque instant aux coups de la mort. D’autres gémissent, dans une dure captivité sur la terre étrangère, et comme les Juifs exilés à Babylone, ils pourraient dire « comment chanter, ici les hymnes de Sion ? ». D’autres, et ce sont les plus heureux, ayant héroïquement consommé leur sacrifice, habitent maintenant les régions de la lumière et de la paix éternelles ».

Monseigneur l’Archevêque adresse une deuxième lettre « à ceux de ses prêtres et séminaristes qui sont à l’armée ». Après avoir manifesté son désir d’avoir plus de nouvelles de ses prêtres, il les exhorte et les encourage non seulement au dévouement inlassable, mais aussi à prendre soin de leur âme de chrétiens et de prêtres. Nous ne sommes encore qu’au début de ce terrible conflit, mais Monseigneur l’Archevêque veut encourager aussi leur espérance, au-delà des épreuves et souffrances du moment : « vous nous arriverez donc, après vos longues campagnes, plus puissants et plus résolus à faire le bien, beaucoup de bien... courage don, mes bons et chers amis ! … Soyez sévères à vous-mêmes, et constamment bons à vos camarades... Soldats toujours, vous si Français ! Mais toujours, aussi, prêtres, et prêtres par la vertu autant que par le caractère. »